Prospective vignes et vins 2040-2044
Date de publication : 13/03/2023
Ce document constitue le rapport détaillé de l’exercice de prospective pour la filière française vignes et vins. Vingt ans après un premier exercice sur et pour la filière vignes et vins à l'échelle nationale.
Actualiser une prospective en vue d’élaborer des scénarios pour l’avenir de la filière vitivinicole, qui puissent servir aux décideurs de la filière, via l’élaboration de stratégies gagnantes.
Méthodologie
La prospective est un exercice de coconstruction de scénarios d’avenir à long terme (ici 20-25 ans) qui incombe à un groupe spécifiquement constitué de professionnels de la filière et d’experts. Pour élaborer les 4 scénarios, l’originalité de la présente étude est d’avoir mobilisé :
• une sélection d’hypothèses toujours pertinentes de l’exercice Prospective vignes et vins – Scénarios et défis pour la Recherche publié par l’INRAE en 2003 ;
• une sélection des hypothèses élaborées à l’occasion de 12 exercices réalisés au cours des 20 dernières années pour des parties de la filière (vins bio, coopération viticole, filière languedocienne,…) ;
• des hypothèses identifiées comme importantes dans divers travaux de prospective plus récents. Ce travail d’actualisation de la prospective d’origine s’est déroulé en deux phases réalisées par deux groupes différents : d’abord 10 membres, experts de la démarche prospective, associés avec l’ICV (Institut Coopératif du Vin) et l’IHEV (Institut des Hautes Études de la Vigne et du vin) qui se sont réunis pour évaluer les hypothèses retenues dans le travail de 2003 ainsi que celles des 12 déclinaisons. Ce groupe a construit une représentation du système « vignes et vins » et a constitué une liste de 348 hypothèses. Dans cette méthode, les hypothèses sont des phrases simples rédigées en recto et en verso. Exemple : « en France, la production de raisin et de vin est majoritairement pilotée par les distributeurs sur cahier des charges. » versus « en France, la production de raisin et de vin n’est majoritairement pas pilotée par les distributeurs. ». La seconde phase a été portée par un autre groupe, constitué d’acteurs de la filière vins et de son environnement administratif et scientifique. Parmi les 348 hypothèses, celles jugées comme les plus importantes pour l’avenir ont été sélectionnées, soit 102, et les relations d’influence/dépendance qu’elles ont entre elles ont été établies. Ensuite, les hypothèses les plus liées entre elles ainsi que leurs relations ont constitué la trame de scénarios. Un scénario est une histoire possible, plausible, ni convenue, ni délirante, finalement ni vraie ni fausse, ni probable ni improbable mais suffisamment pertinente pour provoquer la réaction des acteurs. La méthodologie spécifique à la prospective ne prétend donc pas prédire l’avenir mais s’attache à permettre d’anticiper différentes situations que l’on pourrait rencontrer, sans préjuger de leur caractère probable, souhaitable ou au contraire redoutable. L’analyse des conséquences de ces scénarios va servir de base aux réflexions stratégiques « Ainsi perçue, la prospective n’est pas une évasion dans le futur mais le moyen, pour les décideurs et les chercheurs, de revenir au présent, mieux armés pour l’infléchir selon leurs intentions et leurs exigences. » (Sebillotte, 2002). Leur mise en débat lors des réunions de restitution a permis de recueillir de premiers éléments d’appropriation des scénarios et de positionnements stratégiques.
Résultats
Les quatre scénarios pour la filière vitivinicole à l’horizon 2040-45 ont en commun d’aborder des familles de questions. Ces questions peuvent être structurées autour de trois grandes thématiques :
• celles relatives au contexte général : le contexte macro-économique, les attentes sociétales en matière de santé et d’environnement, d’acceptabilité des biotechnologies, et les questions portant sur le changement climatique ;
• celles relatives à la filière et à ses acteurs depuis les techniques de création variétale, la transmission des exploitations, les systèmes de production, mais aussi la réglementation spécifique notamment en matière œnologique, l’origine des capitaux, le commerce extérieur, les circuits de distribution physiques et numériques et l’organisation de la concertation dans la filière ;
• enfin celles relatives aux produits et aux marchés : avec la demande mondiale, l’image du vin, le rôle des prescripteurs, les évolutions de la consommation en France, et les critères de différenciation liés à l’origine ou à la durabilité.
Les quatre scénarios sont les suivants :
• filière nomade pilotée par l’aval : les fondements offre-demande de la filière vitivinicole issus du XXe siècle sont bouleversés ;
• production innovante et vertueuse pour des vins d’exportation : le salut de la filière vitivinicole repose sur les marchés extérieurs ;
• filière performante et vin plaisir : la filière vitivinicole reconquiert son marché intérieur ;
• filières régionales coordonnées et pluralité des signes de qualité : la filière vitivinicole s’organise de l’amont à l’aval pour proposer une offre renouvelée autour des labels environnementaux et sociaux.
Conclusion
Le positionnement des acteurs vis-à-vis des différents scénarios les invite à la proactivité positive ou négative (agir dès aujourd’hui pour influer sur le futur, en favorisant ou défavorisant l’advenue de tel ou tel scénario) ou à la réactivité anticipée voire à structurer une veille. Fin 2022 et début 2023, deux forums de mise en débat des scénarios ont été organisés avec l’Institut Agro de Montpellier. Ces forums ont permis aux participants (décideurs de organisations professionnelles, des entreprises et chercheurs) de se saisir de ce travail pour adopter des positionnements stratégiques.