Retombées économiques des valorisations agricoles non alimentaires (VANA) pour les exploitations agricoles
Date de publication : 23/10/2023
Cette étude a pour objectif d’estimer les retombées économiques pour les exploitations agricoles des valorisations non alimentaires des pailles de grandes cultures, du lin, du chanvre, du miscanthus, de la méthanisation et des effluents d'élevage, afin d’éclairer aussi bien les professionnels que les pouvoirs publics. Les atouts et les freins au développement de ces cultures et débouchés sont également présentés.
Méthodologie
L’étude comporte trois volets :
• analyse bibliographique et analyse des données existantes ;
• réalisation d’entretiens de cadrage auprès d’acteurs de la filière, pour bien appréhender les enjeux et problématiques de la valorisation du produit concerné et les différents débouchés ;
• réalisation d’entretiens auprès d’un échantillon d’agriculteurs (52 pour la méthanisation, 67 pour les pailles de grandes cultures, 59 pour les effluents d’élevage, 41 pour le miscanthus, 45 pour le lin, 45 pour le chanvre ; soit un total de 309), pour les interroger sur leurs motivations et freins, leurs coûts de production, la valorisation et les débouchés du produit considéré, ainsi que les facteurs agronomique, logistique, humain, géographique et financier influant sur la valorisation.
Résultats
Concernant le chanvre, la vente de paille et de chènevis sans transformation permet de dégager une marge semi-nette d’environ 430 €/ha. Cette marge tient compte de la vente du chènevis (prix moyen de 791 €/t) et de la paille non rouie (123 €/t). Cette valorisation est la plus courante au sein des producteurs de chanvre, car elle concerne les producteurs sous contrats avec les chanvrières (75 % des exploitations). La paille de chanvre rouie se vend à un prix supérieur à la paille non rouie, 224 €/t, et in fine, permet de dégager une marge semi-nette supérieure à la précédente, avec 635 €/ha.
L’essentiel des coûts de production du miscanthus sont liés à son implantation (3 500 €/ ha, préparation du sol incluse). La culture nécessite peu de travail les années suivantes. Les rendements progressent jusqu’à la 5e année pour atteindre 13 tMB/ha en année de croisière. La vente directe permet de dégager les marges plus élevées, mais nécessite un temps de travail plus important pour la commercialisation (non inclus dans les données présentées) : prix de l’ordre de 150 €/t pour le paillis en vrac, 335 €/t pour le Big Bag et 565 €/t en sac de 8 à 25 kg, pour une marge semi-nette de 1 058 à 1 657 €/ha environ et 92 à 144 €/t.
Les rendements en paille de lin sont en moyenne de 6,1 tMB/ha. Tous les agriculteurs travaillent avec une ou plusieurs unités de teillage. Les fibres longues, utilisées par l’industrie textile, sont les plus recherchées et donc les mieux valorisées (3,26 €/kg en moyenne). La fibre courte est utilisée pour différents usages techniques (isolation, papeterie et textile technique notamment) et le prix payé au producteur s’établit à 0,78 €/kg. Enfin, les graines (huile industrielle et alimentation animale) et les anas (écoconstruction, litière, paillage) sont bien plus faiblement valorisés, respectivement 0,48 et 0,05 €/kg. La marge semi-nette moyenne sur l’échantillon est de 2 778 €/ha et 461 €/t.
62 % des volumes de paille sont retournés au sol ; le reste est exporté. Le broyage de la paille et l’échange paille-fumier permettent d’économiser des fertilisants et génèrent une économie immédiate de 26 à 33 €/ha. À noter que d’autres aspects bénéfiques de cette pratique n’ont pas été chiffrés. La vente de paille en andains permet aux agriculteurs non équipés en matériel de pressage de générer une marge semi-nette de l’ordre de 90 €/ ha. La plus-value est plus importante pour la vente de paille en balles rondes (101 €/ha) ou en balles carrées (176 €/ha), mais nécessite plus de main-d’œuvre et de matériel.
Le principal coût des unités de méthanisation est l’investissement (construction des installations et du site). Les charges opérationnelles sont dominées par le coût des substrats : le fumier de bovin est le substrat le moins cher (0,19 €/Nm3 CH4 livré), les cultures intermédiaires à vocation énergétique sont les plus chères (autour de 0,40 €/Nm3 CH4). En moyenne, les marges des unités de méthanisation sont plus élevées en injection qu’en cogénération, la valorisation de la chaleur étant pour cette dernière un enjeu important pour augmenter la marge.
Fin 2021, le cheptel français compte plus de 331 millions d’animaux, dont 58 % de bovins, 26 % de volailles et 10 % de porcs en équivalent Unités de gros bétail (UGB). L’épandage reste la principale source de valorisation des effluents d’élevage. Les échanges paille-fumier représentent 6 % des volumes : sur la base d’un prix de paille à 25 €/t, l’économie de paille réalisée est de 22,8 €/t en moyenne pour l’échange de fumier bovin et de 25 €/t pour le fumier de volaille.
Conclusion
Chaque valorisation agricole non alimentaire est caractérisée par ses propres atouts et contraintes. À l’exception du lin où les teilleurs se chargent de la valorisation, les marges dégagées dépendent des choix effectués par les agriculteurs, en termes d’investissement dans du matériel, du temps de travail alloué (ex. de la paille mieux valorisée en botte carrée mais nécessitant plus de main-d’œuvre et du matériel spécifique par rapport aux andains) et l’existence de débouchés locaux (ex. des producteurs de chanvre indépendants, qui valorisent mieux le chènevis mais qui doivent se charger de trouver un débouché).